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ALBERT EINSTEIN
Potsdam, juillet 1932
Monsieur et Cher Ami,
Je suis heureux qu’en m’invitant à un libre échange de
vues avec une personne de mon choix sur un sujet désigné à mon gré, la
Société des Nations et son Institut international de Coopération
Intellectuelle à Paris m’aient, en quelque sorte, donné l‘occasion
précieuse de m’entretenir avec vous d’une question qui, en l’état
présent les choses, m’apparaît comme la plus importante dans l’ordre de
la civilisation : Existe-t-il un moyen d’affranchir les hommes de la
menace de la guerre ?
D’une façon assez générale, on s’entend aujourd’hui à
reconnaître que les progrès de la technique ont rendu pareille question
proprement vitale pour l’humanité civilisée, et cependant les ardents
efforts consacrés à la solution de ce problème ont jusqu’ici échoué
dans d’effrayantes proportions.
Je crois que, parmi ceux aussi que ce problème occupe
pratiquement et professionnellement, le désir se manifeste, issu d’un
certain sentiment d’impuissance, de solliciter sur ce point l’avis de
personnes que le commerce habituel des sciences a placées à une
heureuse distance à l’égard de tous les problèmes de la vie. En ce qui
me concerne, la direction habituelle de ma pensée n’est pas de celles
qui ouvrent des aperçus dans les profondeurs de la volonté et du
sentiment humains, et c’est pourquoi, dans l’échange de vues que
j’amorce ici, je ne puis guère songer à faire beaucoup plus qu’essayer
de poser le problème et, tout en laissant par avance de côté les
tentatives de solution plus ou moins extérieures, vous donner
l’occasion d’éclairer la question sous l’angle de votre profonde
connaissance de la vie instinctive de l’homme. Je suis convaincu que
vous serez à même d’indiquer des moyens éducatifs qui, par une voie,
dans une certaine mesure étrangère à la politique, seraient de nature à
écarter des obstacles psychologiques, que le profane en la matière peut
bien soupçonner, mais dont il n’est pas capable de jauger les
correspondances et les variations.
Pour moi qui suis un être affranchi de préjugés nationaux,
la face extérieure du problème – en l’espèce, l’élément d’organisation
– m’apparaît simple : les États créent une autorité législative et
judiciaire pour l’apaisement de tous les conflits pouvant surgir entre
eux. Ils prennent l’engagement de se soumettre aux lois élaborées par
l’autorité législative, de faire appel au tribunal dans tous les cas
litigieux, de se plier sans réserve à ses décisions et d’exécuter, pour
en assurer l’application, toutes les mesures que le tribunal estime
nécessaires. Je touche là à la première difficulté : un tribunal est
une institution humaine qui pourra se montrer, dans ses décisions,
d’autant plus accessible aux sollicitations extra-juridiques qu’elle
disposera de moins de force pour la mise en vigueur de ses verdicts. Il
est un fait avec lequel il faut compter : droit et force sont
inséparablement liés, et les verdicts d’un organe juridique se
rapprochent de l’idéal de justice de la communauté, au nom et dans
l’intérêt de laquelle le droit est prononcé, dans la mesure même où
cette communauté peut réunir les forces nécessaires pour faire
respecter son idéal de justice. Mais nous sommes actuellement fort loin
de détenir une organisation supra-étatiste qui soit capable de conférer
à son tribunal une autorité inattaquable et de garantir la soumission
absolue à l’exécution de ses sentences. Et voici le premier principe
qui s’impose à mon attention : la voie qui mène à la sécurité
internationale impose aux États l’abandon sans condition d’une partie
de leur liberté d’action, en d’autres termes, de leur souveraineté, et
il est hors de doute qu’on ne saurait trouver d’autre chemin vers cette
sécurité.
Un simple coup d’oeil sur l’insuccès des efforts,
certainement sincères, déployés au cours des dix dernières années
permet à chacun de se rendre compte que de puissantes forces
psychologiques sont à l’oeuvre, qui paralysent ces efforts. Certaines
d’entre elles sont aisément perceptibles. L’appétit de pouvoir que
manifeste la classe régnante d’un État contrecarre une limitation de
ses droits de souveraineté. Cet « appétit politique de puissance »
trouve souvent un aliment dans les prétentions d’une autre catégorie
dont l’effort économique se manifeste de façon toute matérielle. Je
songe particulièrement ici à ce groupe que l’on trouve au sein de
chaque peuple et qui, peu nombreux mais décidé, peu soucieux des
expériences et des facteurs sociaux, se compose d’individus pour qui la
guerre, la fabrication et le trafic des armes ne représentent rien
d’autre qu’une occasion de retirer des avantages particuliers,
d’élargir le champ de leur pouvoir personnel.
Cette simple constatation n’est toutefois qu’un premier
pas dans la connaissance des conjonctures. Une question se pose
aussitôt : comment se fait-il que cette minorité-là puisse asservir à
ses appétits la grande masse du peuple qui ne retire d’une guerre que
souffrance et appauvrissement ? (Quand je parle de la masse du peuple,
je n’ai pas dessein d’en exclure ceux qui, soldats de tout rang, ont
fait de la guerre une profession, avec la conviction de s’employer à
défendre les biens les plus précieux de leur peuple et dans la pensée
que la meilleure défense est parfois l’attaque.) Voici quelle est à mon
avis la première réponse qui s’impose : cette minorité des dirigeants
de l’heure a dans la main tout d’abord l’école, la presse et presque
toujours les organisations religieuses. C’est par ces moyens qu’elle
domine et dirige les sentiments de la grande masse dont elle fait son
instrument aveugle.
Mais cette réponse n’explique pas encore l’enchaînement
des facteurs en présence, car une autre question se pose.: comment
est-il possible que la masse, par les moyens que nous avons indiqués,
se laisse enflammer jusqu’à la folie et au sacrifice ? Je ne vois pas
d’autre réponse que celle-ci : l‘homme a en lui un besoin de haine et
de destruction. En temps ordinaire, cette disposition existe à l’état
latent et ne se manifeste qu’en période anormale ; mais elle peut être
éveillée avec une certaine facilité et dégénérer en psychose
collective. C’est là, semble-t-il, que réside le problème essentiel et
le plus secret de cet ensemble de facteurs. Là est le point sur lequel,
seul, le grand connaisseur des instincts humains peut apporter la
lumière.
Nous en arrivons ainsi à une dernière question :
existe-t-il une possibilité de diriger le développement psychique de
l’homme de manière à le rendre mieux armé contre les psychoses de haine
et de destruction ? Et loin de moi la pensée de ne songer ici qu’aux
êtres dits incultes. J’ai pu éprouver moi-même que c’est bien plutôt la
soi-disant «.intelligence.» qui se trouve être la proie la plus facile
des funestes suggestions collectives, car elle n’a pas coutume de
puiser aux sources de l’expérience vécue, et que c’est au contraire par
le truchement du papier imprimé qu’elle se laisse le plus aisément et
le plus complètement saisir.
Et, pour terminer, ceci encore : je n’ai parlé jusqu’ici
que de la guerre entre États, en d’autres termes, des conflits dits
internationaux. Je n’ignore pas que l’agressivité humaine se manifeste
également sous d’autres formes et dans d’autres conditions (par exemple
la guerre civile, autrefois causée par des mobiles religieux,
aujourd’hui par des mobiles sociaux, — la persécution des minorités
nationales). Mais c’est à dessein que j’ai mis en avant la forme de
conflit la plus effrénée qui se manifeste au sein des communautés
humaines, car c’est en partant de cette forme là qu’on décèlera le plus
facilement les moyens d’éviter les conflits armés.
Je sais que dans vos ouvrages vous avez répondu, soit
directement soit indirectement, à toutes les questions touchant au
problème qui nous intéresse et nous presse. Mais il y aurait grand
profit à vous voir développer le problème de la pacification du monde
sous le jour de vos nouvelles investigations, car un tel exposé peut
être la source de fructueux efforts.
Très cordialement à vous.
A. Einstein
SIGMUND FREUD
Vienne, septembre 1932
Cher Monsieur Einstein,
En apprenant que vous aviez l’intention de m’inviter à un
échange de vues sur un sujet auquel vous accordez votre intérêt et qui
vous semble mériter aussi l’attention d’autres personnes, je n’ai pas
hésité à me prêter à cet entretien. Je présumais que vous choisiriez un
problème qui fût aux confins de ce que l’on peut connaître aujourd’hui,
et auquel nous pussions l’un et l’autre, le physicien et le
psychologue, accéder chacun par sa propre voie, de manière à nous
rencontrer sur le même terrain, tout en partant de régions différentes.
Aussi m’avez-vous surpris en me posant la question de savoir ce que
l’on peut faire pour libérer les humains de la menace de la guerre.
J’ai été tout d’abord effrayé de mon – j’allais dire notre –
incompétence, car je voyais là une tâche pratique dont l’apanage
revenait aux hommes d’État. Mais je me suis rendu compte que vous
n’aviez pas soulevé la question en tant qu’homme de science et
physicien, mais comme ami des humains, répondant à l’invitation de la
Société des Nations, tel l’explorateur Fridtjof Nansen lorsqu’il
entreprit de venir en aide aux affamés et aux victimes de la guerre
mondiale, privés de patrie. Je réfléchis aussi que l’on n’attendait pas
de moi l’énoncé de propositions pratiques, mais que j’avais simplement
à exposer le problème de la sauvegarde de la paix, à la lumière de
l’examen psychologique.
Mais là-dessus encore, vous avez dit l’essentiel dans
votre lettre et vous m’avez du même coup pris le vent de mes voiles,
mais je me prête volontiers à voguer dans votre sillage et je me
contenterai de confirmer ce que vous avancez, tout en y apportant mes
digressions, au plus près de mes connaissances — ou de mes conjectures.
Vous commencez par poser la question entre droit et force.
C’est là, assurément, le juste point de départ de notre enquête.
Puis-je me permettre de substituer au mot « force » le terme plus
incisif et dur de « violence » ? Droit et violence sont actuellement
pour nous des antinomies. Il est facile de montrer que l’un est dérivé
de l’autre, et si nous remontons aux origines primitives pour examiner
de quelle manière le phénomène s’est produit tout d’abord, la solution
du problème nous apparaît sans difficulté. Si, dans ce qui va suivre,
vous me voyez exposer comme autant d’éléments nouveaux, des faits
généralement connus et reconnus, vous me le pardonnerez la filiation
des données m’y obligeait.
Les conflits d’intérêts surgissant entre les hommes sont
donc, en principe, résolus par la violence. Ainsi en est-il dans tout
le règne animal, dont l’homme ne saurait s’exclure ; pour l’homme, il
s’y ajoute encore, bien entendu, des conflits d’opinion, qui s’élèvent
jusqu’aux plus hauts sommets de l’abstraction et dont la solution
semble nécessiter une technique différente. Mais cette complication
n’est apparue que plus tard. À l’origine, dans une horde restreinte,
c’est la supériorité de la force musculaire qui décidait ce qui devait
appartenir à l’un, ou quel était celui dont la volonté devait être
appliquée, liant force musculaire, secondée et bientôt remplacée
par l’usage d’instruments ; la victoire revient à qui possède les
meilleures armes ou en use avec le plus d’adresse. L’intervention de
l’arme marque le moment où déjà la suprématie intellectuelle commence à
prendre la place de la force musculaire ; le but dernier de la lutte
reste le même : l’une des parties aux prises doit être contrainte, par
le dommage qu’elle subit et par l’étranglement de ses forces, à
abandonner ses revendications ou son opposition. Ce résultat est acquis
au maximum lorsque la violence élimine l’adversaire de façon durable,
le tue par conséquent. Ce procédé offre deux avantages : l’adversaire
ne pourra reprendre la lutte à une nouvelle occasion et son sort
dissuadera les autres de suivre son exemple. Par ailleurs, la mise à
mort de l’ennemi satisfait une disposition instinctive, sur laquelle
nous aurons à revenir. Il arrive qu’au dessein de tuer vienne s’opposer
le calcul selon lequel l’ennemi peut être employé pour rendre d’utiles
services, si, une fois tenu en respect, on lui laisse la vie sauve. En
pareil cas, la violence se contente d’asservir au lieu de tuer. C’est
ainsi qu’on commence à épargner l’ennemi, mais le vainqueur a dès lors
à compter avec la soif de vengeance aux aguets chez le vaincu, et il
abandonne une part de sa propre sécurité.
Tel est donc l’état originel, le règne de la puissance
supérieure, de la violence brutale ou intellectuellement étayée. Nous
savons que ce régime s’est modifié au cours de l’évolution, et qu’un
chemin a conduit de la violence au droit, — mais lequel ? Il n’en est
qu’un, à mon avis, et c’est celui qui aboutit au fait que l’on peut
rivaliser avec un plus fort par l’union de plusieurs faibles. « L’union
fait la force. » La violence est brisée par l’union, la force de ces
éléments rassemblés représente dès lors le droit, par opposition à la
violence d’un seul. Nous voyons donc que le droit est la force d’une
communauté. C’est encore la violence, toujours prête à se tourner
contre tout individu qui lui résiste, travaillant avec les mêmes
moyens, attachée aux mêmes buts ; la différence réside, en réalité,
uniquement dans le fait que ce n’est plus la violence de l’individu qui
triomphe, mais celle de la communauté. Mais, pour que s’accomplisse ce
passage de la violence au droit nouveau, il faut qu’une condition
psychologique soit remplie. L’union du nombre doit être stable et
durable. Si elle se créait à seule fin de combattre un plus puissant
pour se dissoudre une fois qu’il est vaincu, le résultat serait nul. Le
premier qui viendrait ensuite à s’estimer plus fort chercherait de
nouveau à instituer une hégémonie de violence, et le jeu se répéterait
indéfiniment. La communauté doit être maintenue en permanence,
s’organiser, établir des règlements qui préviennent les insurrections à
craindre, désigner des organes qui veillent au maintien des règlements,
des lois, et qui assurent l’exécution des actes de violence conformes
aux lois. De par la reconnaissance d’une semblable communauté
d’intérêts, il se forme, au sein des membres d’un groupe d’hommes
réunis, des attaches d’ordre sentimental, des sentiments de communauté,
sur lesquels se fonde, à proprement parler, la force de cette
collectivité.
Je crois avoir ainsi indiqué tous les éléments essentiels
; le triomphe sur la violence par la transmission du pouvoir à une plus
vaste unité, amalgamée elle-même par des relations de sentiments. Tout
le reste n’est que commentaires et redites. La situation est simple,
tant que la communauté ne se compose que d’un certain nombre
d’individus d’égale force. Les lois de cette association fixent alors,
en ce qui concerne les manifestations violentes de la force, la part de
liberté personnelle à laquelle l’individu doit renoncer pour que la vie
en commun puisse se poursuivre en sécurité. Mais un tel état de
tranquillité ne se conçoit que théoriquement ; de fait, le cours des
choses se complique, parce que la communauté, dès l’origine, renferme
des éléments de puissance inégale – hommes et femmes, parents et
enfants – et que bientôt, la guerre et l’assujettissement créent des
vainqueurs et des vaincus, qui se transforment en maîtres et esclaves.
Le droit de la communauté sera, dès lors, l’expression de ces
inégalités de pouvoir, les lois seront faites par et pour les
dominateurs, et on laissera peu de prérogatives aux sujets. À partir de
ce moment-là, l’ordre légal se trouve exposé à des perturbations de
deux provenances : tout d’abord les tentatives de l’un ou de l’autre
des seigneurs pour s’élever au-dessus des restrictions appliquées à
tous ses égaux, pour revenir, par conséquent, du règne du droit au
règne de la violence ; en second lieu, les efforts constants des sujets
pour élargir leur pouvoir et voir ces modifications reconnues dans la
loi, donc pour réclamer, au contraire, le passage du droit inégal au
droit égal pour tous. Ce dernier courant sera particulièrement marqué
quand se produiront véritablement, au sein de la communauté, des
modifications dans les attributions du pouvoir comme il arrive par
suite de divers facteurs historiques. Le droit peut alors s’adapter
insensiblement à ces nouvelles conditions, ou, ce qui est plus
fréquent, la classe dirigeante n’est pas disposée à tenir compte de ce
changement : c’est l’insurrection, la guerre civile, d’où la
suppression momentanée du droit, et de nouveaux coups de force, à
l’issue desquels s’instaure un nouveau régime du droit. Il est encore
une autre source de transformation du droit, qui ne se manifeste que
par voie pacifique, et c’est le changement de culture qui s’opère parmi
les membres de la communauté ; mais il rentre dans un ordre de
phénomènes qui ne pourra être traité que plus loin.
Nous voyons donc que, même à l’intérieur d’une communauté,
le recours à la violence ne peut être évité dans la solution des
conflits d’intérêt. Mais les nécessités, les communautés d’intérêt
issues d’une existence commune sur un même sol, hâtent l’apaisement de
ces luttes et, sous de tels auspices, les possibilités de solutions
pacifiques sont en progression constante. Mais il suffit de jeter un
coup d’oeil sur l’histoire de l’humanité pour assister à un défilé
ininterrompu de conflits, que ce soit une communauté aux prises avec un
ou plusieurs autres groupements, que ce soit entre unités tantôt vastes
tantôt plus réduites, entre villes, pays, tribus, peuples, empires,
conflits presque toujours résolus par l’épreuve des forces au cours
d’une guerre. De telles guerres aboutissent ou bien au pillage, ou bien
à la soumission complète, à la conquête de l’une des parties.
On ne saurait porter un jugement d’ensemble sur les
guerres de conquête. Nombre d’entre elles, comme celle des Mongols et
des Turcs, n’ont apporté que du malheur ; d’autres, en revanche, ont
contribué à la transformation de la violence en droit, en créant de
plus vastes unités au sein desquelles la possibilité du recours à la
force se trouvait supprimée et un nouveau régime de droit apaisait les
conflits. Ainsi les conquêtes romaines qui apportèrent aux pays
méditerranéens la précieuse pax romana. Les ambitions territoriales des
rois de France ont créé un royaume uni dans la paix et florissant. Si
paradoxal que cela puisse paraître, force nous est d’avouer que la
guerre pourrait bien n’être pas un moyen inopportun pour la fondation
de la paix « éternelle », car elle s’avère capable de constituer les
vastes unités au sein desquelles une puissance centrale rend de
nouvelles guerres impossibles. Cependant elle n’aboutit pas à ce
résultat, car les succès de la conquête sont, en règle générale, de
courte durée, les unités nouvellement créées se désagrègent à leur tour
presque toujours faute de cohésion entre les parties réunies par
contrainte. Et, de plus, la conquête n’a pu créer, jusqu’ici, que des
unifications partielles – de grande envergure il est vrai –, et dont
les conflits réclamèrent justement des solutions brutales. Le résultat
de tous ces efforts guerriers fut simplement que l’humanité échangea
les innombrables et quasi incessantes escarmouches contre de grandes
guerres, d’autant plus dévastatrices qu’elles étaient rares.
En ce qui concerne notre époque, la même conclusion
s’impose, à laquelle vous avez abouti par un plus court chemin. II
n’est possible d’éviter à coup sûr la guerre que si les hommes
s’entendent pour instituer une puissance centrale aux arrêts de
laquelle on s’en remet dans tous les conflits d’intérêt. En pareil cas,
deux nécessités s’imposent au même titre : celle de créer une semblable
instance suprême et celle de la doter de la force appropriée. Sans la
seconde, la première n’est d’aucune utilité. Or la Société des Nations
a bien été conçue comme autorité suprême de ce genre, mais la deuxième
condition n’est pas remplie. La Société des Nations ne dispose pas
d’une force à elle et ne peut en obtenir que si les membres de la
nouvelle association – les différents États – la lui concèdent. Et il y
a peu d’espoir, pour le moment, que la chose se produise. Mais on ne
comprendrait en somme pas pourquoi cette institution a été créée, si
l’on ne savait qu’elle représente, dans l’histoire de l’humanité, une
tentative bien rarement conçue, et jamais réalisée en de pareilles
proportions. Tentative qui consiste à acquérir l’autorité, c’est-à-dire
l’influence contraignante, d’ordinaire basée sur la détention de la
force, en faisant appel à certains principes idéaux. Deux facteurs,
nous l’avons vu, assurent la cohésion d’une communauté : la contrainte
de violence et les relations de sentiment. — Les identifications, comme
on les désignerait en langage technique —, entre les membres de ce même
corps. Si l’un des facteurs vient à disparaître, il se peut faire que
l’autre maintienne la communauté. De telles notions ne peuvent
naturellement avoir une signification que si elles correspondent à
d’importants éléments de communauté. Reste alors à savoir quelle en est
la puissance. L’histoire nous apprend que ces notions ont réellement
exercé leur action. L’idée panhellénique, par exemple, la conscience
d’être quelque chose de mieux que les barbares voisins, et dont on
retrouve la si vigoureuse expression dans les confédérations
amphictyoniques, dans les oracles et dans les jeux, fut assez puissante
pour adoucir le régime de la guerre parmi les Grecs, mais non point
suffisante, naturellement, pour supprimer les conflits armés entre les
diverses factions du peuple grec ni même pour dissuader une ville ou
une fédération de villes de s’allier aux Perses ennemis pour abaisser
un rival. Le sentiment de communauté chrétienne, dont on sait pourtant
la puissance, n’a pas davantage, au temps de la Renaissance, empêché de
petits et de grands États chrétiens de rechercher l’appui du Sultan
dans les guerres qu’ils se livrèrent entre eux. À notre époque
également, il n’est aucune idée à qui l’on puisse accorder une telle
autorité conciliatrice. Les idéals nationaux qui gouvernent aujourd’hui
les peuples – la chose n’est que trop claire – poussent à l’acte
d’opposition. Il ne manque pas de gens pour prédire que, seule, la
pénétration universelle de l’idéologie bolcheviste pourra mettre un
terme aux guerres, — mais nous sommes de toute manière encore fort loin
d’un tel aboutissement, et peut-être n’y saurait-on parvenir qu’après
d’effroyables guerres civiles. Il semble donc que la tentative
consistant à remplacer la puissance matérielle par la puissance des
idées se trouve, pour le moment encore, vouée à l’échec, on commet une
erreur de calcul en négligeant le fait que le droit était, à l’origine,
la force brutale et qu’il ne peut encore se dispenser du concours de la
force.
Je ne puis mieux faire maintenant que commenter une autre
de vos propositions. Vous vous étonnez qu’il soit si facile d’exciter
les hommes à la guerre et vous présumez qu’ils ont en eux un principe
actif, un instinct de haine et de destruction tout prêt à accueillir
cette sorte d’excitation. Nous croyons à l’existence d’un tel penchant
et nous nous sommes précisément efforcés, au cours de ces dernières
années, d’en étudier les manifestations. Pourrais-je, à ce propos, vous
exposer une partie des lois de l’instinct auxquelles nous avons abouti,
après maints tâtonnements et maintes hésitations ? Nous admettons que
les instincts de l’homme se ramènent exclusivement à deux catégories.:
d’une part ceux qui veulent conserver et unir ; nous les appelons
érotiques – exactement au sens d’eros dans le Symposion de Platon – ou
sexuels, en donnant explicitement à ce terme l’extension du concept
populaire de sexualité ; d’autre part, ceux qui veulent détruire et
tuer ; nous les englobons sous les termes de pulsion agressive ou
pulsion destructrice. Ce n’est en somme, vous le voyez, que la
transposition théorique de l’antagonisme universellement connu de
l’amour et de la haine, qui est peut-être une forme de la polarité
d’attraction et de répulsion qui joue un rôle dans votre domaine. –
Mais ne nous faites pas trop rapidement passer aux notions de bien et
de mal –. Ces pulsions sont tout aussi indispensables l’une que l’autre
; c’est de leur action conjuguée ou antagoniste que découlent les
phénomènes de la vie. Or il semble qu’il n’arrive guère qu’un instinct
de l’une des deux catégories puisse s’affirmer isolément ; il est
toujours « lié », selon notre expression, à une certaine quantité de
l’autre catégorie, qui modifie son but, ou, suivant les cas, lui en
permet seule l’accomplissement. Ainsi, par exemple, l’instinct de
conservation est certainement de nature érotique ; mais c’est
précisément ce même instinct qui doit pouvoir recourir à l’agression,
s’il veut faire triompher ses intentions. De même l’instinct d’amour,
rapporté à des objets, a besoin d’un dosage d’instinct de possession,
s’il veut en définitive entrer en possession de son objet. Et c’est
précisément la difficulté qu’on éprouve à isoler les deux sortes
d’instincts, dans leurs manifestations, qui nous a si longtemps empêché
de les reconnaître.
Si vous voulez bien poursuivre encore un peu avec moi,
vous verrez que les actions humaines révèlent une complication d’une
autre sorte. Il est très rare que l’acte soit l’oeuvre d’une seule
incitation instinctive, qui déjà en elle-même doit être un composé
d’eros et de destruction. En règle générale, plusieurs motifs,
pareillement composés, doivent coïncider pour amener l’action. L’un de
vos confrères l’avait déjà perçu — je veux parler ici du professeur G.
Ch. Lichtenberg, qui enseignait la physique à Göttingue à l’époque de
nos classiques ; mais chez lui, le psychologue était peut-être plus
important encore que le physicien. Il avait découvert la rose des
motifs quand il déclarait « Les mobiles en raison desquels nous
agissons pourraient être répartis comme les trente-deux vents et leurs
appellations se formuler Pain –.Pain-Renommée ou Renommée.–
Renommée-Pain. »
Ainsi donc, lorsque les hommes sont incités à la guerre,
toute une série de motifs peuvent en eux trouver un écho à cet appel,
les uns nobles, les autres vulgaires, certains dont on parle
ouvertement et d’autres que l’on tait. Nous n’avons aucune raison de
les énumérer tous. Le penchant à l’agression et à la destruction se
trouve évidemment au nombre de ceux-ci : d’innombrables cruautés que
nous rapportent l’histoire et la vie journalière en confirment
l’existence. En excitant ces penchants à la destruction par d’autres
tendances érotiques et spirituelles, on leur donne naturellement le
moyen de s’épancher plus librement. Parfois, lorsque nous entendons
parler des cruautés de l’histoire, nous avons l’impression que les
mobiles idéalistes n’ont servi que de paravent aux appétits
destructeurs ; en d’autres cas, s’il s’agit par exemple des cruautés de
la Sainte Inquisition, nous pensons que les mobiles idéaux se sont
placés au premier plan, dans le conscient, et que les mobiles
destructeurs leur ont donné, dans l’inconscient, un supplément de
force. Les deux possibilités sont plausibles.
J’ai scrupule à abuser de votre attention qui entend se
porter sur les moyens de prévenir la guerre et non sur nos théories. Et
pourtant, je voudrais m’attarder encore un instant à notre instinct de
destruction, dont la vogue n’est rien en regard de son importance. Avec
une petite dépense de spéculation, nous en sommes arrivés à concevoir
que cette pulsion agit au sein de tout être vivant et qu’elle tend à le
vouer à la ruine, à ramener la vie à l’état de matière inanimée. Un tel
penchant méritait véritablement l’appellation d’instinct de mort,
tandis que les pulsions érotiques représentent les efforts vers la vie.
L’instinct de mort devient pulsion destructrice par le fait qu’il
s’extériorise, à l’aide de certains organes, contre les objets. L’être
animé protège pour ainsi dire sa propre existence en détruisant
l’élément étranger. Mais une part de l’instinct de mort demeure
agissante au-dedans de l’être animé et nous avons tenté de faire
dériver toute une série de phénomènes normaux et pathologiques de cette
réversion intérieure de la pulsion destructrice. Nous avons même commis
l’hérésie d’expliquer l’origine de notre conscience par un de ces
revirements de l’agressivité vers le dedans. On ne saurait donc, vous
le voyez, considérer un tel phénomène à la légère, quand il se
manifeste sur une trop grande échelle ; il en devient proprement
malsain, tandis que l’application de ces forces instinctives à la
destruction dans le monde extérieur soulage l’être vivant et doit avoir
une action bienfaisante. Cela peut servir d’excuse biologique à tous
les penchants haïssables et dangereux contre lesquels nous luttons.
Force nous est donc d’avouer qu’ils sont plus près de la nature que la
résistance que nous leur opposons et pour laquelle il nous faut encore
trouver une explication. Peut-être avez-vous l’impression que nos
théories sont une manière de mythologie qui, en l’espèce, n’a rien de
réconfortant. Mais est-ce que toute science ne se ramène pas à cette
sorte de mythologie ? En va-t-il autrement pour vous dans le domaine de
la physique ?
Voilà qui nous permet de conclure, pour revenir à notre
sujet, que l’on ferait oeuvre inutile à prétendre supprimer les
penchants destructeurs des hommes. En des contrées heureuses de la
terre, où la nature offre à profusion tout ce dont l’homme a besoin, il
doit y avoir des peuples dont la vie s’écoule dans la douceur et qui ne
connaissent ni la contrainte ni l’agression. J’ai peine à y croire et
je serais heureux d’en savoir plus long sur ces êtres de félicité. Les
bolchevistes eux aussi espèrent arriver à supprimer l’agression humaine
en assurant l’assouvissement des besoins matériels tout en instaurant
l’égalité entre les bénéficiaires de la communauté. J’estime que c’est
là une illusion. Ils sont, pour l’heure, minutieusement armés et la
haine qu’ils entretiennent à l’égard de tous ceux qui ne sont pas des
leurs n’est pas le moindre adjuvant pour s’assurer la cohésion de leurs
partisans. D’ailleurs, ainsi que vous le marquez vous-même, il ne
s’agit pas de supprimer le penchant humain à l’agression ; on peut
s’efforcer de le canaliser, de telle sorte qu’il ne trouve son mode
d’expression dans la guerre.
En partant de nos lois mythologiques de l’instinct, nous
arrivons aisément à une formule qui fraye indirectement une voie à la
lutte contre la guerre. Si la propension à la guerre est un produit de
la pulsion destructrice, il y a donc lieu de faire appel à l’adversaire
de ce penchant, à l’eros. Tout ce qui engendre, parmi les hommes, des
liens de sentiment doit réagir contre la guerre. Ces liens peuvent être
de deux sortes. En premier lieu, des rapports tels qu’il s’en manifeste
à l’égard d’un objet d’amour, même sans intentions sexuelles. La
psychanalyse n’a pas à rougir de parler d’amour, en l’occurrence, car
la religion use d’un même langage : aime ton prochain comme toi-même.
Obligation facile à proférer, mais difficile à remplir. La seconde
catégorie de liens sentimentaux est celle qui procède de
l’identification. C’est sur eux que repose, en grande partie, l’édifice
de la société humaine.
Je trouve, dans une critique que vous portez sur l’abus de
l’autorité, une seconde indication pour la lutte indirecte contre le
penchant à la guerre. C’est l’une des faces de l’inégalité humaine –
inégalité native et que l’on ne saurait combattre –, qui veut cette
répartition en chefs et en sujets. Ces derniers forment la très grosse
majorité ; ils ont besoin d’une autorité prenant pour eux des décisions
auxquelles ils se rangent presque toujours sans réserves. Il y aurait
lieu d’observer, dans cet ordre d’idées, que l’on devrait s’employer,
mieux qu’on ne l’a fait jusqu’ici, à former une catégorie supérieure de
penseurs indépendants, d’hommes inaccessibles à l’intimidation et
adonnés à la recherche du vrai, qui assumeraient la direction des
masses dépourvues d’initiative. Que l’empire pris par les pouvoirs de
l’État et l’interdiction de pensée de l’Église ne se prêtent point à
une telle formation, nul besoin de le démontrer. L’État idéal
résiderait naturellement dans une communauté d’hommes ayant assujetti
leur vie instinctive à la dictature de la raison. Rien ne pourrait
créer une union aussi parfaite et aussi résistante entre les hommes,
même s’ils devaient pour autant renoncer aux liens de sentiment les uns
vis-à-vis des autres. Mais il y a toute chance que ce soit là un espoir
utopique. Les autres voies et moyens d’empêcher la guerre sont
certainement plus praticables, mais ils ne permettent pas de compter
sur des succès rapides. On ne se plait guère à imaginer des moulins qui
moudraient si lentement qu’on aurait le temps de mourir de faim avant
d’obtenir la farine.
Vous le voyez, on n’avance guère les choses, à vouloir
consulter des théoriciens étrangers au monde, quand il s’agit de tâches
pratiques et urgentes. Mieux vaudrait s’efforcer, pour chaque cas
particulier, d’affronter le danger avec les moyens qu’on a sous la
main. Je voudrais cependant traiter encore un problème que vous ne
soulevez pas dans votre lettre et qui m’intéresse spécialement.
Pourquoi nous élevons-nous avec tant de force contre la guerre, vous et
moi et tant d’autres avec nous, pourquoi n’en prenons-nous pas notre
parti comme de l’une des innombrables vicissitudes de la vie ? Elle
semble pourtant conforme à la nature, biologiquement très fondée, et,
pratiquement, presque inévitable. Ne vous scandalisez pas de la
question que je pose ici. Pour les besoins d’une enquête, il est
peut-être permis de prendre le masque d’une impassibilité qu’on ne
possède guère dans la réalité. Et voici quelle sera la réponse : parce
que tout homme a un droit sur sa propre vie, parce que la guerre
détruit des vies humaines chargées de promesses, place l’individu dans
des situations qui le déshonorent, le force à tuer son prochain contre
sa propre volonté, anéantit de précieuses valeurs matérielles, produits
de l’activité humaine, etc. On ajoutera en outre que la guerre, sous sa
forme actuelle, ne donne plus aucune occasion de manifester l’antique
idéal d’héroïsme et que la guerre de demain, par suite du
perfectionnement des engins de destruction, équivaudrait à
l’extermination de l’un des adversaires, ou peut-être même des deux.
Tout cela est exact et paraît même si incontestable qu’on
en est réduit à s’étonner qu’un accord unanime de l’humanité n’ait
point encore banni la guerre. On peut évidemment discuter l’un ou
l’autre de ces points et se demander, par exemple, si la communauté ne
doit pas avoir, elle aussi, un droit sur la vie de l’individu ; on ne
saurait condamner au même titre tous les germes de guerre.; tant qu’il
y aura des empires et des nations décidées à exterminer les autres sans
pitié, ces autres-là doivent être équipés pour la guerre. Mais nous
avons hâte de passer sur tous ces problèmes, ce n’est point la
discussion à laquelle vous entendiez m’engager. Je veux en arriver à
autre chose. Je crois que le motif essentiel pourquoi nous nous élevons
contre la guerre, c’est que nous ne pouvons faire autrement. Nous
sommes pacifistes, parce que nous devons l’être en vertu de mobiles
organiques. Il nous est désormais facile de justifier notre attitude
par des arguments.
Voilà qui ne va pas sans explication. Et voici ce que
j’ajoute depuis des temps immémoriaux, l’humanité subit le phénomène du
développement de la culture. (D’aucuns préfèrent, je le sais, user ici
du terme de civilisation.) C’est à ce phénomène que nous devons le
meilleur de ce dont nous sommes faits et une bonne part de ce dont nous
souffrons. Ses causes et ses origines sont obscures, son aboutissement
est incertain, et quelques-uns de ses caractères sont aisément
discernables. Peut-être conduit-il à l’extinction du genre humain, car
il nuit par plus d’un côté à la fonction sexuelle, et actuellement déjà
les races incultes et les couches arriérées de la population
s’accroissent dans de plus fortes proportions que les catégories
raffinées. Peut-être aussi ce phénomène est-il à mettre en parallèle
avec la domestication de certaines espèces animales.; il est indéniable
qu’il entraîne des modifications physiques ; on ne s’est pas encore
familiarisé avec l’idée que le développement de la culture puisse être
un phénomène organique de cet ordre. Les transformations psychiques qui
accompagnent le phénomène de la culture sont évidentes et indubitables.
Elles consistent en une éviction progressive des fins instinctives,
jointe à une limitation des réactions impulsives. Des sensations qui,
pour nos ancêtres, étaient chargées de plaisir nous sont devenues
indifférentes et même intolérables ; il y a des raisons organiques à la
transformation qu’ont subie nos aspirations éthiques et esthétiques. Au
nombre des caractères psychologiques de la culture, il en est deux qui
apparaissent comme les plus importants : l’affermissement de
l’intellect, qui tend à maîtriser la vie instinctive, et la réversion
intérieure du penchant agressif, avec toutes ses conséquences
favorables et dangereuses. Or les conceptions psychiques vers
lesquelles l’évolution de la culture nous entraîne se trouvent heurtées
de la manière la plus vive par la guerre, et c’est pour cela que nous
devons nous insurger contre elle.; nous ne pouvons simplement plus du
tout la supporter ; ce n’est pas seulement une répugnance
intellectuelle et affective, mais bien, chez nous, pacifistes, une
intolérance constitutionnelle, une idiosyncrasie en quelque sorte
grossie à l’extrême. Et il semble bien que les dégradations esthétiques
que comporte la guerre ne comptent pas pour beaucoup moins, dans notre
indignation, que les atrocités qu’elle suscite.
Et maintenant combien de temps faudra-t-il encore pour que
les autres deviennent pacifistes à leur tour ? On ne saurait le dire,
mais peut-être n’est-ce pas une utopie que d’espérer dans l’action de
ces deux éléments, la conception culturelle et la crainte justifiée des
répercussions d’une conflagration future, — pour mettre un terme à la
guerre, dans un avenir prochain. Par quels chemins ou détours, nous ne
pouvons le deviner. En attendant, nous pouvons nous dire : tout ce qui
travaille au développement de la culture travaille aussi contre la
guerre.
Je vous salue très cordialement et si mon exposé a pu vous décevoir, je vous prie de me pardonner.
Votre Sigmund Freud |